Pour les écho-urgentistes expérimentés, ou tout du moins réguliers, cette affirmation fait partie des fondamentaux. Pourtant, il n’est pas inutile de la rappeler et de penser à insister sur ce point avec nos étudiants et apprenants.
Donc à ce propos, voici une petite (et véridique) histoire…
Il était une fois un pauvre bûcheron qui habitait dans un pays fort fort lointain. Il travaillait très dur tous les jours pour nourrir sa famille. Un jour, épuisé par son travail harassant, il ne vit pas assez tôt la chute d’un arbre qu’il était en train de couper. Le tronc d’arbre en tombant lui écrasa le ventre. Mais notre homme, solide comme un roc, ne poussa pas un seul cri et réussit à repousser l’arbre qui le faisait suffoquer…
Il reprit ensuite son travail. Il n’en était tout de même pas à son premier accident, il n’allait donc pas s’arrêter pour si peu.
Deux jours plus tard, il rendit visite à sa fille qui habitait dans un pays également fort fort lointain de chez son père. Tout vaillant qu’il était, ce brave papa finit par se tordre de douleur pendant le repas de midi, ce qui le conduisit tout droit dans le service des urgences le plus proche.
Fort heureusement, ce service avait en son sein un écho-urgentiste qui fourbissait son échographe tout en rongeant son frein… Il lui fit prestement une échographie abdominale, que dans les temps ancestraux on nommait “une FAST”. Et voici le résultat:
Il y avait donc un épanchement intra péritonéal, visible sur cette première fenêtre. En fenêtre sus pubienne longitudinale pour explorer le cul de sac de Douglas, voici l’image :
Pour terminer, il reste à explorer, si cela n’a pas été fait après la coupe sur le Morrisson, l’espace spléno-rénal (à gauche) :
Pas d’épanchement visible à gauche… Il semble tout de même exister une petite image bizarre sur la rate, non? Alors n’en restons pas là et focalisons un peu nos ultrasons sur cet organe :
Les lésions intra spléniques sont parfaitement visibles, dont une arrondie et hypoéchogène. Elle témoigne d’un hématome intra splénique assez volumineux.
Bien entendu cet épanchement et ces lésions ont été confirmées au scanner, lequel n’a pas objectivé de saignement actif. Il y avait eu suffusion hémorragique au départ du traumatisme, mais 48h après il n’y avait donc pas de signe d’une quelconque brèche hémorragique. Les lésions traumatiques étaient uniquement spléniques, mais l’épanchement n’était visible que du côté opposé et dans le Douglas. Donc pas de conclusion trop hâtive en écho…
Notre brave bûcheron a été surveillé dans le service de chirurgie viscérale. Il est resté parfaitement stable et aucune rupture secondaire de rate n’a été déplorée …