Telle ne devrait pas être la question…
Cette histoire aurait également pû s’appeler : “Comment sauver un testicule et l’honneur de mon chirurgien de garde ?”.
Je déambulais donc dans le couloir des urgences, sévèrement accroché à mon appareil d’échographie ( oui, maintenant beaucoup de gens veulent me le prendre). Soudain, j’entends une voix sortir du box pédiatrique : “C’est bon, pas de soucis, c’est une orchite et votre enfant peut repartir à la maison avec des anti inflammatoires”. Comme j’étais à l’affut de la moindre écho, je m’adresse à l’urologue qui venait de parler. Il avait été appelé pour testicule gauche très douloureux et inflammatoire chez un jeune garçon de 14 ans. Je lui propose diplomatiquement de jeter un “coup d’oeil d’écho” comme ça, l’air de rien, pour la beauté du geste et la gloire de la science. Ayant une petite idée de l’affaire, je commence par le testicule non douloureux, le droit :
En fait, tout ça dans le but de caler mon image écho de référence sur le testis sain : réglage de la PRF et du Gain du doppler. Je regarde s’illuminer harmonieusement le testicule sain.
Avec ces réglages, je regarde ensuite le testicule douloureux : s’il est silencieux en doppler, c’est une torsion très probablement… comme je suis quand même un inquiet, je joue encore de la PRF et du GAIN, en dehors de mes valeurs initiales. Je vais jusqu’à obtenir des artéfacts en aliasing et de l’over lapping, mais toujours pas de flux doppler : il n’y a donc pas de vascularisation dans le testicule gauche.
Mais tout ça, c’est très classique.
Alors je regarde avec ma sonde l’épididyme et le gros paquet que fait le cordon spermatique gauche.
Cette fois-ci, mon échographe va me montrer de belles images…
Voici le cordon spermatique enroulé, visible comme un amas échogène. Il existe un petit flux doppler en AMONT, silencieux en AVAL. On peut voir la présence d’un début d’épanchement liquidien dans lequel baigne le cordon spermatique. En principe, cela n’est pas bon et sent la nécrose constituée.
Au final, notre jeune homme ne rentrera pas à la maison et il sera opéré en urgence par le chirurgien urologue.
Mes messages :
- la bibliographie dit que l’échographie ne doit pas retarder la prise en charge chirurgicale. Cela est vrai, il ne faut jamais l’oublier. Le délai habituel “consenti” pour espérer sauver un testicule est de 6 heures depuis le début de la douleur. Cependant, l’écho-urgentiste qui reçoit le patient peut examiner d’emblée le testicule avec son appareil… Etudes à entreprendre avec ce nouveau paradigme..?
- Attention aux réglages gain et PRF en doppler : il ne faut pas conclure trop vite à l’ischémie si l’on n’a pas fait un examen comparatif avec le testicule sain ni effectué les bons réglages !
- La puberté est une période à risque de torsion testiculaire !
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